III. LA PLÉNITUDE DE L'UNION TRANSFORMANTE
Vingt-septième strophe
Elle est entrée l'épouse
dans le verger aimable et désiré
et à son gré repose,
son cou vient s'incliner
sur la douceur des bras du bien-aimé.
Nous avons là une autre strophe charnière qui rapporte comment l'âme est introduite dans l'état plénier et définitif du mariage spirituel. Jean de la Croix en profite pour récapituler le chemin parcouru dans les strophes précédentes : de la première à la cinquième "elle s'est exercée dans les travaux et les amertumes de la mortification et de la méditation". De la sixième à la onzième "elle est passée par les peines et les défilés d'amour." Dans les suivantes : depuis "Ami, détourne-les" jusqu'à celle-ci, "elle dit avoir reçu de grandes communications et beaucoup de visites de son ami, où elle est allée en se perfectionnant et en s'établissant en son amour, de manière que sortant de toutes choses et d'elle-même, elle s'est donnée à lui dans l'union d'amour des fiançailles spirituelles."
Elle est entrée l'épouse
"Nous arrivons là au mariage spirituel qui n'était pas encore contracté. Celui-ci est beaucoup plus que les fiançailles. C'est une totale transformation en l'aimé, où les deux parties se donnent mutuellement l'une à l'autre avec une entière possession de chacune, par une union d'amour consommée. En cette union, l'âme est rendue divine et faite Dieu par participation, autant qu'il se peut faire en cette vie. Car, comme en la consommation du mariage charnel, comme dit l'Écriture sainte, de même, en ce mariage spirituel entre Dieu et l'âme, quand il est consommé, il y a deux natures en un seul esprit et un seul amour de Dieu.
L'époux parle de cet état en ce vers : "Elle est entrée l'épouse", voulant dire : laissant dehors tout ce qui temporel et naturel, toutes les affections et tous les modes, et en oubli de tous les troubles, tentations, peines, sollicitudes et soucis.
dans le verger aimable et désiré
c'est-à-dire se transformant en son Dieu, qui est celui qu'elle appelle ici verger aimable, à cause de la délectation qu'elle trouve en lui.
Le Seigneur même l'appelle et la met en son jardin fleuri pour consommer avec lui ce très heureux état de mariage, où il se fait une telle union des deux natures et une telle communication de la divine à l'humaine, que pas une ne changeant son être, chacune semble être Dieu.
En cet état il y a une abondance et une plénitude de Dieu bien plus grandes, une paix plus assurée, plus stable, et une suavité plus parfaite qu'en celui des fiançailles spirituelles. D'une telle âme on peut dire ce que St Paul disait de lui-même aux Galates : "Je vis, mais non plus moi, c'est le Christ qui vit en moi."
et à son gré repose,
L'âme vivant une vie si heureuse et si fortunée - une vie de Dieu - goûte et sent une délectation et une gloire de Dieu en sa substance désormais transformée en Lui.
son cou vient s'incliner
sur la douceur des bras du bien-aimé.
Ce cou dénote la force qui est celle avec laquelle l'âme agit... et incliner le cou sur les bras de Dieu, c'est avoir désormais sa force, ou pour mieux dire sa faiblesse, unie à la force de Dieu. Car les bras de Dieu signifient sa force, en laquelle notre faiblesse, inclinée et transformée, a désormais la force de Dieu même... Désormais Dieu est la douce force de l'âme qui la protège et la défend de tous les maux, et lui donne la saveur de tous les biens.
Le mariage spirituel est le baiser que l'âme donne à Dieu... et s'accomplit ici ce qui est dit dans les Cantiques : "Déjà l'hiver est passé, la pluie s'en est allée et les fleurs ont paru sur notre terre."
Ce beau texte sur le mariage spirituel, "cette transformation totale en l'aimé", "cette union d'amour consommée", "ce baiser que l'âme donne à Dieu", ce nouveau et merveilleux printemps, se passe de commentaire. Notons simplement que Jean de la Croix l'achève en douceur et en force, dans "les bras de Dieu qui est désormais la douce force de l'âme".
Vingt-huitième strophe
Au-dessous du pommier,
comme épouse t'ai prise près de moi,
la main je t'ai donnée
et tu fus réparée
là où ta mère avait été violée.
"En ce haut état du mariage spirituel, l'époux découvre très facilement et fort souvent ses merveilleux secrets à l'âme et lui fait part de ses oeuvres. Il lui communique principalement les doux mystères de son Incarnation, la façon et la manière de la Rédemption du monde, qui est l'une de ses plus hautes oeuvres.
Au-dessous du pommier,
Il entend par le pommier l'arbre de la Croix, où le Fils de Dieu a accompli la Rédemption et s'est fiancé à la nature
humaine, et partant avec chaque âme.
comme épouse t'ai prise près de moi,
la main je t'ai donnée
A savoir la main de ma faveur et de mon aide, t'élevant de ton bas et faible état à ma compagnie et à mes fiançailles."
et tu fus réparée
là où ta mère avait été violée.
Jean de la Croix établit là un parallèle entre l'arbre du paradis terrestre sous lequel la nature humaine, en la personne d'Ève, fut tentée et corrompue et l'arbre de la Croix sur lequel, en la personne du Christ, elle fut réparée et vivifiée.
"Et ainsi Dieu lui découvre les dispositions de sa sagesse, à savoir comment il sait sagement et bellement tirer les biens des maux et ce qui a été cause de mal, l'ordonner à un plus grand bien."
L'intérêt de cette strophe est dans son optimisme. Dieu prend occasion du mal pour produire un plus grand bien. A travers la mort honteuse et atroce infligée à Jésus, il opère le salut du monde. Face à la haine meurtrière des hommes s'affirme la puissance de l'amour.
Jean de la Croix avait, comme son nom l'indique, une affinité particulière avec ce mystère dont il parle souvent. On a aussi de lui un dessin du Christ en croix conservé au couvent de l'Incarnation d'Avila.
Vingt-neuvième et trentième strophes
O vous, oiseaux légers,
lions, cerfs et daims bondissants,
monts, vallées et rivages,
ondes, souffles, ardeurs,
et craintes des nuits d'insomnie,
Par les lyres légères
et le chant des sirènes, je vous prie,
que cessent vos colères
Ne touchez pas au mur,
que l'épouse trouve un sommeil plus sûr.
Ces deux strophes sont les dernières à avoir été écrites dans le cachot de Tolède. Dieu y finit d'établir l'âme dans une paix parfaite. Le Cantique spirituel aurait pu s'arrêter là, comme le poème de la Nuit obscure, dans le sommeil des puissances de l'âme.
"Dans ces strophes, l'époux donne à entendre comment par le moyen des lyres légères, qui signifient la suavité dont on jouit ordinairement en cet état, et aussi par le chant des sirènes, qui signifie la délectation que l'âme y reçoit continuellement, il achève de mettre fin à toutes les opérations et passions de l'âme qui la troublaient auparavant."
Jean de la Croix se livre dans le détail de son commentaire à une lecture allégorique des images de son poème :
- les oiseaux légers sont les digressions de l'imagination,
- les lions : les impétuosités de l'agressivité,
- les cerfs et les daims bondissants : les craintes et les hardiesses de la convoitise,
- les monts, vallées et rivages : les actes désordonnés de la mémoire, de l'entendement et de la volonté.
- les ondes, souffles, ardeurs et craintes des nuits d'insomnie sont les affections des quatre passions que sont la douleur, l'espérance, la joie et la crainte.
- les colères résument l'ensemble des mouvements désordonnés de l'âme.
L'époux ordonne à tous ces mouvements perturbants des facultés de cesser désormais en raison :
- des lyres légères et du chant des sirènes, c'est-à-dire de la suavité et du plaisir dans lesquels l'âme est désormais établie.
- Quant au mur, il s'agit du rempart de paix des vertus et des perfections de l'âme qui en font un jardin clos. Rien ni personne ne doit y toucher afin que l'épouse trouve un sommeil plus sûr. Ce sommeil est la quiétude parfaite dans laquelle elle est désormais établie.
Pour parler de cette sérénité de l'âme, Jean de la Croix a des accents stoïciens : "Car en cette transformation d'amour il lui advient de même qu'aux anges qui pèsent parfaitement les choses qui sont de douleur, sans en sentir aucune, et exercent les oeuvres de miséricorde et de compassion sans sentir de pitié."
Cette "apathéia" de l'âme constitue sans doute pour lui un effet direct de sa divinisation. La nature humaine devenue divine ne saurait, pas plus que celle de Dieu, être soumise à trouble, souffrance et angoisse. Mais pressentant les objections qu'une telle idée peut susciter, il ajoute : "Encore que parfois et en certaines choses Dieu use de dispense envers elle, lui donnant à sentir et la laissant pâtir afin qu'elle mérite davantage, comme il fit avec la Vierge sa mère."
Il aurait pu en dire autant du Christ, pour échapper à la critique de docétisme. Mais il préfère ajouter : "Néanmoins l'état ne comporte pas cela de soi." Bref le mariage spirituel est vraiment tout proche de l'état des ressuscités. A tel point que l'âme semble même ne plus avoir rien à espérer : "En les désirs de l'espérance elle ne peine pas non plus, parce qu'étant désormais satisfaite dans l'union divine, elle n'a rien attendre touchant le monde, ni touchant le spirituel rien à désirer, puisqu'elle se voit et se sent comblée des richesses de Dieu. Et ainsi pour ce qui est de vivre et de mourir elle est conforme et ajustée à la volonté de Dieu, et le désir qu'elle a de le voir est sans peine."
Nous sommes loin des tourments décrits au début du Cantique.
Pourtant, si l'on en juge par sa biographie, Jean de la Croix n'a pas fini sa vie dans une grande paix. Dépouillé de ses charges, relégué au désert de la Penuela puis à Ubeda où le prieur du lieu et un enquêteur chargé de le discréditer l'ont persécuté, malade, couvert d'ulcères et de plaies, il a connu dans l'isolement, la douleur et l'abandon de tous, une période aussi difficile que celle du cachot de Tolède. Sans doute a-t-il eu à porter, comme Marie et Jésus, le poids d'une souffrance rédemptrice.
Etty Hillesum, peu au fait pourtant des subtilités théologiques, parle de cette souffrance avec des accents émouvants : "Je ne suis pas seule à être fatiguée, malade, triste ou angoissée, je le suis à l'unisson de millions d'autres à travers les siècles, tout cela c'est la vie... Depuis hier soir, du fond de mon lit, j'assimile un peu de la souffrance infinie qui, disséminée dans le monde entier, attend des âmes pour l'assumer." "Cet hiver nous l'endurons au même titre que toute une partie de l'humanité, et avec nos ennemis pourvu que nous nous sentions imbriqués dans un grand tout et que nous nous sachions les combattants d'un des multiples fronts disséminés à la surface de la terre." (Journal, p.191, 216 et 205)
Reprenant un texte d'André Suarez elle écrit aussi : "La douleur n'est pas le lieu de notre désir, mais celui de notre pleine vérité... Je ne prétends pas que nous devions en faire un état d'élection. On doit au contraire tout faire pour s'en libérer. Mais on doit aussi la connaître. L'homme véritable n'est pas le maître de sa douleur, ni son fugitif, ni son esclave. Il doit en être le rédempteur." (Ed. néerl. p.192).
Etty aussi a fini sa vie dans des conditions pénibles : à Auschwitz, après trois semaines d'épuisante détention. L'expérience d'union à Dieu qu'elle a vécue et dont elle témoigne, était donc pour elle, comme pour Jean de la Croix et Jésus - compatible avec la plus grande détresse. C'est encore elle qui écrivait : "Il y a place pour tout dans une vie : pour la foi en Dieu et pour une mort lamentable." (Journal, p.136).
Trente et unième strophe
O nymphes de Judée
Tant que sur les fleurs et sur les rosiers
l'ambre exhale un parfum,
restez dans vos quartiers,
veuillez ne point toucher à notre seuil.
C'est l'épouse qui reprend ici la parole mais c'est pour formuler les mêmes voeux que l'époux dans les deux strophes précédentes.
O nymphes de Judée
"Elle appelle Judée la partie inférieure, sensitive, de l'âme... et nymphes toutes les imaginations, fantasmes, mouvements et affections de cette partie.
Tant que sur les fleurs et sur les rosiers
l'ambre exhale un parfum,
Les fleurs sont les vertus de l'âme, les rosiers ses trois facultés, à savoir l'entendement, la mémoire et la volonté.
L'ambre est le divin Esprit qui demeure dans l'âme ; et dire que cet ambre parfume les fleurs et les rosiers, c'est dire que cet Esprit se communique et se répand très suavement dans les facultés et les vertus de l'âme.
restez dans vos quartiers,
Ces quartiers sont les sens intérieurs, l'imagination et la mémoire... Nous pouvons les appeler quartiers hors de la ville, car ce qui s'appelle ville en l'âme, c'est le dedans et ce qui est le plus intime, à savoir la partie spirituelle, celle qui a la capacité de communiquer avec Dieu.
L'âme dit aux nymphes de demeurer dans leurs quartiers, c'est-à-dire de s'apaiser dans les sens intérieurs et extérieurs.
veuillez ne point toucher à notre seuil.
C'est-à-dire ne touchez pas à la partie supérieure, même par vos premiers mouvements.
D'où vient qu'il y a là une vie heureuse, semblable à celle de l'état d'innocence, où toute l'harmonie et l'habileté de la partie sensitive de l'homme lui servait pour une plus grande récréation, une plus grande connaissance et un plus grand amour de Dieu, en paix et concorde avec la partie supérieure. Heureuse l'âme qui parviendra à cet état. "Qui est celui-là ? Nous le louerons parce qu'il a fait des merveilles dans sa vie." (Si 31,9)"
Cette strophe et les précédentes semblent exprimer une inquiétude : celle de perdre la grande paix que Dieu verse dans l'âme en l'état du mariage spirituel. Jean de la Croix termine pourtant son commentaire en précisant que le désir que l'âme y exprime ne veut pas dire qu'elle est vraiment perturbée par son imagination, car celle-ci dans l'état qui est le sien, est désormais apaisée. Sa demande est donc préventive, de précaution.
Trente-deuxième strophe
Cache-toi, mon ami,
tourne ton visage vers les montagnes
et veuille ne rien dire.
Vois plutôt les compagnes
de celle qui va par d'étranges îles.
Les perturbations émotionnelles conjurées, l'épouse exprime ici son voeu le plus cher : celui de jouir, avec son bien-aimé, de leur union dans le secret le plus intime de son âme.
Cache-toi, mon ami,
"Retire-toi au plus intérieur de mon âme, te communiquant à elle en secret et lui découvrant tes merveilles cachées aux yeux de tous les mortels.
tourne ton visage vers les montagnes
Le visage de Dieu, c'est sa divinité, et les montagnes sont les facultés de l'âme : mémoire, entendement et volonté.
L'âme demande ici tout ce qu'elle peut demander... Elle veut le visage de Dieu, c'est-à-dire une communication essentielle de sa divinité, sans aucune autre médiation, par un certain contact... un attouchement de substances nues, à savoir de l'âme et de la divinité.
et veuille ne rien dire.
L'âme désirant ici cette communication essentielle de Dieu, qui ne tombe pas sous les sens, lui demande qu'il ne leur en dise rien.
Vois plutôt les compagnes
Pour Dieu, regarder, c'est aimer. Et celles qu'on appelle compagnes sont l'ensemble des vertus, dons, perfections et richesses spirituelles de l'âme. Et ainsi c'est comme si celle-ci disait : tourne ton visage au dedans, pour aimer ces perfections que tu as mises en moi."
de celle qui va par d'étranges îles.
Il s'agit de l'âme qui va désormais à Dieu par des voies et des moyens inconnus jusqu'alors.
Cette strophe reprend une demande exprimée plus tôt, dans la strophe 6 :
Achève de te donner pour de vrai.
Ne veuille désormais
mander de messagers
qui ne savent me dire ce que je veux.
Toutefois, l'âme est ici rendue plus loin. Elle a bu à la source et a vu, émerveillée, s'évanouir les signes. Elle a compris qu'ils n'étaient que des échos lointains d'un "fleuve au bruit puissant", d'une "musique silencieuse" mais couvrant pourtant tous les bruits. Elle sait ce qu'est le contact direct, entre "substances nues", et ne veut plus d'intermédiaires. Quand la mer est là, pourquoi porter un coquillage à son oreille ?
Trente-troisième strophe
La blanche colombelle,
rameau au bec dans l'arche est retournée.
Déjà la tourterelle,
sur les rivages verts,
a trouvé le compagnon désiré.
"C'est l'époux qui parle ici, chantant la pureté que l'épouse a désormais en cet état et les richesses qu'elle a obtenues... les angoisses et les travaux de la vie et du temps passé étant désormais finis.
La blanche colombelle,
Il appelle l'âme blanche colombe pour la blancheur et la pureté qu'elle a reçue de la grâce divine.
rameau au bec dans l'arche est retournée.
Comme la colombe qui, sortie de l'arche, retourna avec une branche d'olivier dans le bec... de même cette âme, sortie de l'Arche de la toute-puissance de Dieu lorsqu'il la créa, ayant traversé les eaux du déluge des fautes, imperfections, peines et travaux de cette vie, retourne à l'Arche du sein de son créateur avec le rameau d'olivier, qui est la clémence et la miséricorde dont Dieu a usé envers elle... et l'accroissement de récompense et de paix qui suit la victoire.
Déjà la tourterelle,
sur les rivages verts,
a trouvé le compagnon désiré.
On écrit de la tourterelle que quand elle ne trouve pas de compagnon, elle ne se perche pas sur des branches vertes ni ne boit de l'eau claire et fraîche, ni ne se met à l'ombre, mais que l'ayant trouvé et se joignant à lui, elle jouit de tout cela.
Tout cela peut se dire de l'âme... cherchant son ami comme la tourterelle, sans trouver ni vouloir prendre aucune consolation ni aucun rafraîchissement qu'en lui seul... L'époux lui-même chante ici la fin de ses travaux et l'accomplissement de ses désirs... elle s'assied maintenant sur la branche verte, se délectant en son ami, et boit désormais de l'eau claire de la haute contemplation et de la sagesse de Dieu, et de l'eau fraîche, qui est le rafraîchissement qu'elle trouve en lui, et aussi elle se met sous l'ombre de sa protection et de sa faveur qu'elle avait tant désirée, et elle y est consolée et restaurée savoureusement et divinement."
Ce texte envisage l'entrée dans la paix et la joie de Dieu comme un retour. Après avoir traversé les peines et les travaux de la vie, désormais finis, l'âme "retourne à l'Arche du sein de son créateur" où elle trouve "l'accomplissement de ses désirs" : la contemplation et la délectation de la sagesse. On peut rapprocher cette strophe des paroles de Jésus :
"Je suis sorti du Père et venu dans le monde.
Maintenant je quitte le monde et je vais au Père." (Jn 16, 28).
Trente-quatrième strophe
Vivant en solitude,
en solitude elle a posé son nid.
En solitude la guide,
seul à seule l'ami,
blessé d'amour aussi en solitude.
L'époux continue à manifester la joie qu'il a de la solitude de l'âme avant qu'elle n'arrive à l'union, et à l'intérieur de l'union même, car elle a maintenant une demeure paisible et savoureuse en son bien-aimé. C'est lui seul désormais qui la conduit, sans intermédiaire, aussi blessé d'amour qu'elle-même l'est.
Vivant en solitude,
Il s'agit de la tourterelle, c'est-à-dire de l'âme, avant qu'elle eut trouvé son compagnon.
en solitude elle a posé son nid.
L'ayant trouvé, elle continue pourtant sa vie solitaire, c'est-à-dire libre de toute autre affection que celle de son bien-aimé. Mais elle est maintenant au nid, c'est-à-dire dans un lieu de repos et de délassement.
En solitude la guide,
En cette solitude à l'égard de toutes choses, où elle est seule avec Dieu, celui-ci la guide, la meut et l'élève aux choses divines, à savoir à la connaissance et à l'amour de Dieu.
seul à seule l'ami,
Non seulement son ami la conduit seule dans son intimité mais il oeuvre seul en elle, sans intermédiaire, se communicant à elle seulement par lui-même.
"C'est une chose convenable, puisque l'âme a désormais quitté tout et passé par tous les intermédiaires, s'élevant au-dessus de tous à Dieu, que Dieu même soit son guide et le moyen vers lui-même.
blessé d'amour aussi en solitude.
Parce que l'âme est demeurée seule et isolée de toutes choses pour l'amour de lui, Dieu en devient lui-même grandement amoureux... Blessé de l'amour de l'épouse en la solitude qu'elle garde pour lui, il la guide lui seul, se donnant lui-même à elle et accomplissant ses désirs. C'est pourquoi l'époux même dit de l'âme par le prophète Osée : "Je la mènerai dans la solitude et je parlerai à son coeur". Parler au coeur, c'est satisfaire le coeur qui ne se satisfait de rien qui soit moindre que Dieu."
Trente-cinquième strophe
Ami, soyons en joie,
allons tous deux nous voir en ta beauté,
au mont ou à la colline
où l'eau pure jaillit.
Pénétrons plus profond dans les fourrés.
"L'épouse reprend la parole.
Ami, soyons en joie,
A savoir en la communication de la douceur d'amour, non seulement en celle que nous avons dans l'union qui nous est habituelle, mais aussi en celle qui rejaillit de l'exercice d'amour affectif et effectif, des actes intérieurs et des oeuvres extérieures, au service de l'ami.
allons tous deux nous voir en ta beauté,
Qu'en ta beauté je paraisse un autre toi-même et toi un autre moi-même ; que ma beauté soit la tienne et ta beauté la mienne."
au mont ou à la colline
La montagne, commente Jean de la Croix, est la connaissance matinale de Dieu, celle qui s'opère par le Verbe, la très haute sagesse essentielle de Dieu.
La colline est la connaissance vespérale, c'est-à-dire la sagesse de Dieu s'exprimant dans ses créatures.
"L'âme ne peut se voir en la beauté de Dieu et paraître semblable à lui en beauté, si ce n'est en se transformant en la sagesse de Dieu, en laquelle on voit et possède les choses d'en-haut.
où l'eau pure jaillit.
C'est-à-dire où la connaissance et la sagesse de Dieu sont données à l'intelligence, pures, sans images.
Pénétrons plus profond dans les fourrés.
Entrons dans l'épaisseur de vos oeuvres merveilleuses et de vos profonds jugements.
Cette épaisseur de la sagesse et de la science de Dieu est si profonde et si immense que, quoi que l'âme en connaisse, elle peut néanmoins entrer toujours plus avant, parce qu'elle est immense et ses richesses incompréhensibles.
Mais l'épaisseur c'est aussi celle des travaux et des angoisses en tant qu'ils sont un moyen pour entrer dans l'épaisseur de la délectable sagesse de Dieu. Parce que la plus pure souffrance apporte une plus pure et plus intime intelligence, et par conséquent une jouissance plus pure et plus relevée, pour autant qu'elle procède d'une racine plus intérieure.
Oh ! si les hommes comprenaient bien qu'on ne peut arriver à l'épaisseur de la sagesse et des richesses de Dieu qu'en entrant, de maintes façons, dans l'épaisseur des souffrances, et que l'âme qui désire correctement la sagesse désire d'abord d'entrer dans l'épaisseur de la Croix qui est le chemin de la vie !"
Ces propos peuvent choquer dans la mesure où ils semblent faire l'apologie du désir de souffrir. Pourtant, ils peuvent être lus sous un autre éclairage. Celui de Nietzsche par exemple qui proposait de classer les êtres "d'après la profondeur que peut atteindre leur souffrance" et écrivait ceci : "Cette tension de l'âme dans le malheur, qui l'aguerrit, son frisson au moment du grand naufrage, son ingéniosité et sa vaillance à supporter le malheur, à l'endurer, à l'interpréter, à l'exploiter jusqu'au bout, tout ce qui lui a jamais été donné de profondeur, de secret, d'esprit, de ruse, de grandeur, n'a-t-il pas été acquis par la souffrance, à travers la culture de la grande souffrance ?"
Dans ces perspectives la souffrance n'est pas exaltée pour elle-même, mais parce qu'elle constitue le chemin incontournable vers la maturité, la forge où se trempent les âmes, où s'aiguisent les esprits.
Trente-sixième strophe
Nous monterons ensuite
vers les hautes cavernes de la pierre
qui sont si bien cachées
et là nous entrerons
et le jus des grenades goûterons.
Nous monterons ensuite
vers les hautes cavernes de la pierre
"La pierre dont elle parle ici, c'est le Christ, suivant ce que dit St Paul aux Corinthiens : "La pierre c'était le Christ" (1 Cor. 10,4). Les hautes cavernes sont les mystères relevés, hauts et profonds en sagesse de Dieu qui se trouvent dans le Christ.
qui sont si bien cachées
Il y a beaucoup à approfondir dans le Christ parce qu'il est comme une mine fertile qui a de nombreuses cavernes pleines de trésors qu'on fouille incessamment sans pouvoir les épuiser... C'est pourquoi St Paul a dit de lui "que tous les trésors de la sagesse et de la science de Dieu sont cachés en lui." (Col. 2,3). Mais l'âme ne saurait entrer, ni arriver jusqu'à eux si auparavant elle ne traversait l'épaisseur des souffrances extérieures et intérieures... car la connaissance des mystères du Christ est la plus haute sagesse où l'on puisse atteindre en cette vie.
et là nous entrerons
A savoir, l'âme et son bien-aimé... et nous nous transformerons en de nouvelles connaissances et de nouvelles communications d'amour.
et le jus des grenades goûterons.
Les grenades signifient les divins mystères du Christ, les profonds jugements de la sagesse de Dieu et les vertus et attributs de Dieu.
Et le jus des grenades c'est la fruition que l'âme, autant qu'il se peut en cette vie, reçoit en la connaissance de ces attributs et la délectation qu'elle savoure en eux... Mais cette délectation elle la partage avec Dieu comme une chose qui leur est commune à tous deux."
Après avoir pénétré au profond des fourrés, c'est-à-dire dans l'épaisseur de la sagesse de Dieu et de la souffrance qui permet d'y accéder, l'âme entre dans les cavernes cachées que sont les mystères du Christ. Là encore nous dit Jean de la Croix, elle doit pour y accéder traverser l'épaisseur des souffrances extérieures et intérieures. Au coeur de ces deux strophes se trouvent donc le mystère de la passion-résurrection par où doit passer tout être humain afin d'accéder à la joie de la vie éternelle.
Trente-septième strophe
Là tu me montrerais
ce à quoi mon âme prétendait,
puis tu me donnerais,
là, toi qui es ma vie
cela que l'autre jour tu m'as donné.
Dans cette strophe, l'âme imagine ce qu'elle va bientôt recevoir en plénitude et à quoi elle aspire : le double don de l'égalité d'amour et de l'innocence originelle. Ce qui signifie le dépassement de toutes ses limites et imperfections. Elle se voit aimante et pure, parfaitement transparente à l'être et à l'agir divin, égale à Dieu en amour et en lumière.
"Le but pour lequel l'âme désirait entrer dans ces cavernes, c'est pour parvenir entièrement à ce qu'elle avait toujours prétendu, à savoir à l'entier et parfait amour qui est donné en cette communication, car la fin de tout est l'amour. Et aussi pour obtenir parfaitement la rectitude et la pureté de la justice originelle.
Là tu me montrerais
ce à quoi mon âme prétendait,
Cette prétention, c'est l'égalité d'amour que l'âme désire toujours parce que l'amant ne peut pas être satisfait s'il ne sent qu'il aime autant qu'il est aimé. Et comme l'âme voit l'immensité de l'amour dont Dieu l'aime, elle ne veut pas l'aimer moins hautement ni moins parfaitement, et pour cela elle désire la transformation actuelle.
Il faut remarquer que l'âme ne dit pas : tu me donnerais, mais tu me montrerais... car Dieu nous aimant premièrement, il nous enseigne à aimer purement et entièrement comme il nous aime. Se communiquant à l'âme et la transformant en soi, il lui montre un entier amour, généreux, ce qui est proprement lui montrer à aimer : lui mettre l'instrument en mains et lui dire comment elle doit faire.
Ainsi, l'âme en cet état aime Dieu autant qu'elle est aimée de lui, puisqu'un seul amour est leur à tous deux. Et de cette manière d'amour parfait, il naît aussitôt en l'âme une intime et substantielle jubilation en Dieu. Ce qui n'arrive pas sans que Dieu ait donné à l'âme en cet état de transformation une grande pureté.
puis tu me donnerais,
là, toi qui es ma vie
cela que l'autre jour tu m'as donné.
Elle appelle l'autre jour l'état de la justice originelle auquel Dieu en Adam lui donna la grâce et l'innocence, ou le jour du baptême où l'âme reçut la pureté et la totale limpidité qu'on lui donnera bientôt à nouveau en cette union d'amour."
Trente-huitième strophe
L'aspiration de l'air
le chant de la douce philomèle,
le bocage et sa grâce,
parmi la nuit sereine,
la flamme qui consume et plus ne peine.
Cette strophe donne à Jean de la Croix l'occasion de parler de l'union à Dieu sous deux angles. Il l'évoque d'abord comme participation au mouvement d'amour de la Trinité et la présente ensuite comme une connaissance incluant l'univers entier, enraciné dans le Dieu qui lui donne son être. Ces deux opérations s'effectuent dans le cadre d'une nuit tranquille : celle de la contemplation obscure, et d'une ardeur suave : celle de l'amour parfait.
L'aspiration de l'air
Cette aspiration, explique Jean de la Croix, est une touche et un sentiment d'amour très délicats que l'âme sent en la communication de l'Esprit Saint. Car, dit-il, il n'y aurait pas de véritable transformation si l'âme, unie aux deux autres personnes divines, ne s'unissait pas aussi à l'Esprit Saint. "Celui-ci élève hautement l'âme et l'informe afin qu'elle respire en Dieu le même souffle d'amour que le Père respire dans le Fils et le Fils dans le Père. C'est ce que St Paul a voulu signifier lorsqu'il a dit : "Parce que vous êtes enfants de Dieu, Dieu a envoyé l'Esprit de son Fils en vos coeurs, criant : Abba, Père."
Et il n'y a pas de quoi s'émerveiller que l'âme puisse une chose si haute, car supposé que Dieu lui fasse cette grâce que d'arriver à être déiforme et unie à la très sainte Trinité en laquelle elle devient Dieu par participation, pourquoi serait-il incroyable qu'elle opère son oeuvre d'entendement, de connaissance et d'amour en la Trinité, avec la Trinité, comme la Trinité même, de manière participée, Dieu opérant cela en elle ?
Comment cela se fait, il n'y a point de sagesse ni de pouvoir pour le déclarer, si ce n'est en montrant comment le Fils de Dieu nous a obtenu ce haut état et mérité cette situation sublime de pouvoir être fils de Dieu... D'où vient que les âmes possèdent les mêmes biens par participation que lui par nature. C'est pourquoi elles sont véritablement Dieu par participation, les égaux et les compagnons de Dieu.
... Être compagnons de la nature divine, c'est pour l'âme participer à Dieu en opérant en lui en sa compagnie l'oeuvre de la sainte Trinité, de la manière que nous avons dite, à cause de l'union substantielle entre l'âme et Dieu.
Ô âmes crées pour ces grandeurs et qui y êtes conviées, que faites-vous ? A quoi vous amusez-vous ! Vos prétentions sont des bassesses et vos possessions des misères. O déplorable aveuglement des yeux de votre âme, puisqu'ils ne voient goutte entourés d'une si grande lumière et que vous êtes sourds à ces hauts cris, ne voyant pas que tant que vous cherchez les grandeurs et la gloire du monde vous demeurez misérables et abjects, ignorants de si grands biens et indignes d'eux.
le chant de la douce philomèle,
Ce qui naît en l'âme de ce souffle, c'est le chant de la douce philomèle. Parce que comme le chant du rossignol, s'entend au printemps après les froids et les pluies de l'hiver, contente l'ouïe et l'esprit, ainsi, en cette actuelle communication et transformation d'amour, l'épouse, désormais garantie de tous les troubles et de toutes les variations temporelles, dénuée et purgée des imperfections, peines et nuages naturels, sent un nouveau printemps en son esprit où elle entend la douce voix de l'époux qui est son rossignol, et cette voix rafraîchit et renouvelle la substance de son âme.
En ce rafraîchissement, cette protection et ce sentiment savoureux, elle donne aussi sa voix de doux rossignol avec un nouveau chant à Dieu, conjointement avec lui qui le suscite en elle.
le bocage et sa grâce,
Par le bocage elle entend ici Dieu avec toutes les créatures qui sont en lui. Parce que comme tous les arbres et les plantes tiennent leur vie et leur racine dans le bois, de même toutes les créatures célestes et terrestres ont en Dieu leur racine et leur vie. L'âme dit donc que là on lui montrera Dieu, en tant qu'il est la vie et l'être de toutes les créatures.
L'âme désire aussi grandement voir la grâce du bocage, c'est-à-dire non seulement la grâce, la sagesse et la beauté que chaque créature tient de Dieu, mais encore celles qui découlent de la correspondance sage et ordonnée qu'il y a entre elles, ce qui est connaître les créatures par voie contemplative, chose grandement délectable, parce que c'est les connaître dans leur relation à Dieu.
parmi la nuit sereine,
Cette nuit en laquelle l'âme désire de voir ces choses, c'est la contemplation : parce que la contemplation est obscure, c'est pourquoi on l'appelle théologie mystique - ce qui veut dire sagesse de Dieu cachée et secrète - en laquelle sans bruit de paroles et sans le service ni l'aide d'aucun sens corporel ni spirituel, comme dans le silence et la quiétude de la nuit et à l'insu de tous les sens et de tout ce qui est naturel, Dieu enseigne à la dérobée et très secrètement l'âme, sans qu'elle sache comment.
la flamme qui consume et plus ne peine.
Cette flamme est l'amour de Dieu désormais parfait en l'âme ; lequel, pour être parfait, doit posséder deux propriétés, à savoir qu'il consume et transforme l'âme en Dieu et que l'embrasement transformant de cette flamme ne cause plus de peine à l'âme.
Et ainsi cette flamme est un amour suave, parce qu'en transformant l'âme en elle-même, il crée la conformité et satiété des deux parties ; et partant, il ne cause point de peine en variant par augmentation ou défaut, comme il faisait auparavant lorsque l'âme était incapable de parfait amour. Car, en étant devenue capable, l'âme est alors transformée en Dieu et conforme à lui, comme le charbon allumé est semblable au feu et transformé en lui, sans fumer ni crépiter comme il faisait auparavant."
Trente-neuvième strophe
Or nul ne regardait
Aminadab non plus n'apparaissait,
le siège s'apaisait
et la cavalerie
à la vue des eaux descendait la rive.
"Dans cette dernière strophe, l'âme donne à entendre la disposition dans laquelle elle est pour recevoir les grâces dont on jouit dans cet état.
Or nul ne regardait
C'est comme si l'épouse disait : mon âme est si seule, et si étrangère à toutes les choses créés, supérieures et inférieures et si détachée d'elles, elle est entrée si avant avec vous dans le recueillement, que pas une d'elles ne l'atteint du regard, c'est-à-dire ne peut la mouvoir au plaisir ni au dégoût et à l'ennui.
Aminadab non plus n'apparaissait,
Le diable, ennemi de l'âme épouse - appelé Aminadab dans l'Ecriture Sainte - qui la combattait afin qu'elle n'entre pas en cette forteresse et cachette du recueillement intérieur dans l'union de l'ami... ne comparaît plus devant elle.
le siège s'apaisait
Par les assiégeants, l'âme entend ici les passions et les appétits qui l'environnent et la combattent tant qu'ils ne sont pas entièrement arraisonnés. Elle dit qu'ils sont désormais apaisés... c'est-à-dire qu'ils se conforment à l'esprit intérieur et se recueillent à leur manière pour jouir des délices dont l'âme jouit.
et la cavalerie
à la vue des eaux descendait la rive.
Par les eaux elle entend les délices et les biens spirituels de Dieu dont en cet état jouit l'âme. Par la cavalerie elle entend les puissances de la partie sensitive, tant les intérieures que les extérieures. L'épouse dit qu'en cet état elles descendaient à la vue de ces eaux spirituelles parce que la partie sensitive de l'âme est désormais tellement purifiée et spiritualisée qu'elle se recueille pour participer et jouir à sa manière des grandeurs spirituelles que Dieu va communiquant à l'esprit.
L'âme dit qu'elles descendaient pour donner à entendre que ces puissances descendent de leurs opérations et les relâchent, les arrêtent, pour venir au recueillement intérieur dans lequel Jésus-Christ notre Seigneur, très doux époux, veuille mettre tous ceux qui invoquent son nom, auquel est honneur et gloire ensemble avec le Père et l'Esprit-Saint dans les siècles des siècles. Amen."
Louange à Dieu.
Le Cantique spirituel s'achève comme il a commencé. Dans la première strophe, l'âme blessée d'amour, allait chercher son Dieu "dans son centre le plus profond, entrant dans un très grand recueillement au-dedans d'elle-même et y communiquant avec Dieu en amoureux et affectueux entretien." Dans la dernière, "elle se recueille pour participer et jouir des grandeurs spirituelles que Dieu lui communique."
Le recueillement intérieur est, pour Jean de la croix, le premier et le dernier pas de la quête spirituelle. C'est là que, dans une connaissance obscure et amoureuse, l'âme trouve sa source et sa vie.
Je connais bien la source qui coule et fuit,
bien que de nuit.